Quelle IA pour oser la différence ?

Le 2 octobre 2018, nous avons embarqué avec une poignée d’étudiants de l’école 42 à bord de la goélette d’Eric Bellion, fondateur du projet COMMEUNSEULHOMME. À l’occasion de cette virée en mer, nous souhaitions entamer un débat sur le rôle que pourrait jouer l’intelligence artificielle au sein des entreprises afin de les aider à s’ouvrir vers plus de diversité et d’inclusivité. Une discussion en lien avec le premier principe d’action porté par le mouvement d’Eric : « oser la différence ».

Tout au long de ce volet d’introduction sur les aventures You Don’t Need Us x COMMEUNSEULHOMME, nous vous entraînons avec nous pour une première excursion riche en échanges et en réflexions (et sans les effets du mal de mer…). 

NOTRE  OBJECTIF

Cela fait quelques mois que notre communauté s’est plongée dans l’aventure COMMEUNSEULHOMME. Née en 2014, cette initiative a été lancée par l’explorateur et skipper Eric Bellion avec la conviction que la différence entre les êtres constitue une véritable richesse. Selon lui, elle est même la principale source d’innovation, de performance et d’harmonie ainsi que d’enrichissement et de bien-être personnel et collectif. La diversité et l’intelligence collective faisant partie de nos principaux moteurs de réflexion et de transformation interne, nous ne pouvions qu’adhérer à ce merveilleux mouvement pour un monde plus inclusif.

Mardi 2 octobre 2018, nous avons ainsi décidé d’éprouver notre partenariat avec COMMEUNSEULHOMME lors d’une rafraîchissante balade en mer. Aux côtés de Marie, co-fondatrice du mouvement, Eric nous a chaleureusement accueilli à bord de son nouveau navire, baptisé Ahoy. C’est à bord de cette goélette que le Capitaine compte boucler la route du Rhum au mois de novembre, puis parcourir le monde à la recherche d’expériences riches et insolites. (Un parcours que l’on ne manquera pas de suivre !)

Nous avons entraîné avec nous Baptiste, Clément, Jérôme et Sébastien, quatre matelots remplis de ressources étudiant à l’école 42 – une institution dont les méthodes d’apprentissage et la philosophie reflètent nos propres aspirations. Nous avons aussi convié nos amis et collaborateurs Vincent, touriste professionnel et Elodie, anthropologue.

Si nous avons formé cet équipage de choc, avouons-le, ce n’était pas uniquement pour jouer les pirates et manier le gouvernail. Nous voulions surtout profiter de l’air marin pour stimuler les neurones de chacun afin de susciter le dialogue autour de la diversité et de l’intelligence artificielle. Une question nous intéressait tout particulièrement : quelle IA pour oser la différence en entreprise ?

Bien que la mer ait été plutôt agitée ce jour-là (on vous épargne les détails), les échanges furent foisonnants et nous sommes rentrés avec la tête pleine de bonnes idées. Des idées que nous souhaitons, à travers ce récit, partager avec vous. Laissez-nous donc vous conter cette mémorable excursion au large des côtes bretonnes…

CAP SUR LE DEBAT

9h04, Port de Concarneau. En compagnie d’Eric et Marie, nous prenons place à bord d’Ahoy et nous installons confortablement autour de viennoiseries et d’un café bien chaud. Nous rencontrons alors Mathieu, Directeur des opérations de COMMEUNSEULHOMME, Véronique, Chargée de la communication digitale et Alexandre, Préparateur du bateau. Naturellement, un tour de table s’est imposé.

Cela nous a permis d’emblée d’installer un réel climat d’écoute et de prendre connaissance des parcours insolites, des professions et des ambitions de chacun. À l’issue des présentations, nous hissons les voiles pour mettre le cap sur l’archipel des Glénan. Il est 10h00 : l’aventure commence, les échanges s’initient.

Pour Clément, qui a intégré l’école 42 après avoir obtenu un diplôme en Urbanisme à la Sorbonne, les deux thèmes imposés semblent diamétralement opposés. « L’Intelligence Artificielle tend vers une standardisation statistique quand la différence s’exprime dans les valeurs dites ‘extrêmes’», souligne-t-il de manière philosophique. Mais cela ne freine pas le débat pour autant. Au contraire, pour les membres de l’équipage, c’est un beau casse-tête à déchiffrer.

DEFINIR LA DIFFERENCE

Assis en cercle sur le pont du bateau, Yanniss (Fondateur de You don’t need us), Marie, Sébastien, Clément, Mathieu et Elodie évoquent les aspects clés de la notion de différence, pour tenter de la définir. Ce qu’en retient Sébastien, passionné de dessin, c’est que la différence se fait par rapport à un référentiel. Pourquoi définit-on quelque chose comme différent ? À quoi compare-t-on cette chose ?

Et bien, probablement aux normes que l’on intériorise depuis petits, de par la culture à laquelle on est exposée et l’environnement dans lequel on grandit. Ces référentiels sont d’ailleurs de nature variable, ce qui signifie qu’ils ne sont pas absolus. D’ailleurs, en entreprise, les normes sont souvent définies par rapport à plusieurs variables, telles que les projets qu’elle mène, son type de business ou encore ses ambitions.

Muni de son carnet et d’un stylo, Clément note ainsi que, par extension, il n’existe pas de différence absolue. Elodie, quant à elle, rappelle que la différence s’éprouve lorsqu’on compare deux éléments : on repère tout de suite ce qui les distingue. Imposée au groupe, cette même différence amène aussi les problèmes, car elle apporte des visions nouvelles, des valeurs étrangères, une méthode de travail inédite… Une idée partagée par Eric qui, entouré de Vincent, Thomas (co-fondateur de YDNU), Baptiste, Jérôme et Yaël (Copywriter chez YDNU), manie la barre du navire tout en alimentant le débat.

QUEL ROLE JOUE LA DIVERSITE ?

Puisque la différence est synonyme de conflits, « il faut viser l’harmonie totale du groupe avant de se concentrer sur la performance », souligne le skipper. Aux commandes du bateau, on s’interroge plutôt sur l’importance que la différence peut jouer au sein d’un groupe de projet. « Ne travailler qu’avec des gens qui nous ressemblent, c’est un poison. Puisqu’il n’y a pas d’apport clair de la part de chaque collaborateur, cela crée une rivalité malsaine. Sans compter que certains se reposeront ainsi sur leurs acquis pendant que d’autres travailleront deux fois plus pour compenser », illustre Eric. Ce qu’il faut lire ici, c’est qu’une équipe composée de personnalités différentes et de

profils de compétences variés, est plus engageante pour chacun de ses membres. Correctement exploitées, les différences de tous peuvent être source de transgression des normes et, ainsi, force d’innovation pour un projet, note Elodie. « La diversité est, de fait, nécessaire pour faire bouger, changer les choses », résume Vincent l’aventurier.

Sur le pont comme à la barre, on s’interroge d’ailleurs sur ce qui distingue « différence » et « diversité ». En entreprise, faut-il oser l’un, ou l’autre ? Peut-on les interchanger à notre guise ?

Ce qui semble faire écho, c’est plutôt la « différence » qui, elle, se définit comme ceci : un caractère ou ensemble de caractères qui dans une comparaison, un ordre, distingue un être ou élément de celui-ci d’un autre chose. La « diversité », plus globalement, caractérise un ensemble de personnes qui diffère les unes des autres par leur origine géographique, socio-culturelle ou religieuse, leur âge, leur sexe, leur orientation sexuelle… C’est donc la différence que nous devons oser. Synonyme d’inconnu et de prise de risques, la différence fait peur, « surtout dans une société qui prône le risque 0 », étayent Vincent et Jérôme. La diversité a quant à elle moins de problèmes à être acceptée. Nous devons donc l’encourager et l’embrasser.

À L’IA-BORDAGE !

Malgré les secousses qui remuent Ahoy, l’équipage reste plongé dans le débat. Il est l’heure d’aborder le vaste (très vaste) sujet qu’est l’intelligence artificielle. Comment cet immense champ technologique peut-il aider une entreprise à oser la différence ?

En jouant les RH, bien-sûr ! C’est en tout cas la première solution qui nous vient à la bouche. Sans pour autant remplacer les responsables des ressources humaines, l’IA pourrait très bien être utilisée comme assistante. Du côté des étudiants de 42, on s’interroge notamment sur l’intérêt de modéliser la diversité. Puisque l’IA a l’avantage d’être relativement objective (contrairement à son ami l’humain), elle serait capable de rationnaliser et de factualiser le contexte d’évolution de l’entreprise. Elle pourrait ainsi recruter des profils différents selon leur complémentarité avec ceux de l’entreprise. En analysant les profils des employés, l’IA permettrait aussi de créer des équipes tirant un maximum parti des différences de chaque membre et saurait quelle équipe placer sur quel projet.

Sinon, « Pourquoi ne pas gamifier les tests de recrutement ? », propose Clément. « Par exemple, on pourrait les faire jouer à Tetris afin de détecter leur type de raisonnement, leurs méthodes de résolution des problèmes », poursuit-il. Une démarche qui permettrait ainsi de voir quels profils pensent hors de la norme et peuvent apporter de nouvelles approches à l’entreprise.

SUJET EN VOGUE OU REELLE SOLUTION ?

Si l’IA semble offrir une infinité d’usages possibles en termes de management RH, faut-il nécessairement la faire intervenir sur un champ qui relève de notre humanité ? Il y aurait deux écoles. La première aurait tendance à répondre par l’affirmative : une fois le processus algorithmique définit et mis en place, le recrutement pourrait se faire plus rapidement. La deuxième dirait non, car l’IA ne détient pas l’intelligence émotionnelle nécessaire pour capter et valoriser les nuances culturelles et sociétales qui forment un individu et en tirer parti. En 2013, Eric s’était d’ailleurs prêté à l’exercice (sans IA) pour former avec succès la Team Jolokia : un groupe de marins varié, composé de dix femmes et d’hommes valides ou en situation de handicap.

Par ailleurs, pour qu’une intelligence artificielle puisse compléter le rôle de RH à la perfection, il lui faudrait puiser dans une masse de données pour l’instant inconcevable. En effet, il reste encore beaucoup de questions à se poser quant à cet aspect : quelles données doit-on collecter, sur qui ou sur quoi ? Sans compter que relever les informations à relever – sur les individus, sur les entreprises… – pour modéliser la différence pourrait engendrer de nouvelles problématiques d’éthiques à gérer.

L’IA ne fera certainement pas l’affaire toute seule, conclut-on. Il faudrait la coupler à des enquêtes sociologiques et anthropologiques pour la rendre efficace sur le sujet de la diversité. D’autant plus que, de manière logique, il faudrait d’abord définir quels sont les critères différentiant ou diversifiant auxquels se rapporter, mais aussi établir sur quel base une approche ou une population diverse peut être considérée comme un élément de performance.

Après cette riche journée d’échanges, nous comptons poursuivre ces réflexions lors d’ateliers dédiés aux sujets que nous avons abordés. L’occasion pour nous de réfléchir à comment l’IA peut analyser les comportements dans un jeu, ou bien autour des données rationnelles dont nous aurions besoin pour définir le contexte d’un projet, par exemple.

Serez-vous des nôtres ?

– Yaël David, Copywriter pour You Don’t Need Us

Cette journée a été organisée en collaboration avec

 

Et avec la participation de 

 

Cliquez ici pour accéder à la version PDF de cet article : [EP1] QUELLE IA POUR OSER LA DIFFERENCE

Photos : © Sébastien Bruckert, Elodie Perreau, Yaël David

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